Depuis que l'Organisation internationale pour les migrations a commencé à collecter des données en 2014, le naufrage du 24 novembre 2021 constitue la traversée la plus meurtrière de la Manche

Tout débute dans l’après-midi du 23 novembre 2021, un canot, bateau gonflable fragile, dont le fond souple a tendance à se replier quand il prend l’eau et est surchargé, part de LoonPlage avec 30 personnes à destination de l’Angleterre.

Après de quelques heures de navigation, la nuit tombe et le canot fait naufrage dans la Manche. Sa localisation, près de Calais et Dunkerque, porte à confusion. Selon l’un des 2 rescapés, à 2h45, la France et le Royaume-Uni ont été contactés par téléphone « Nous avons appelé la police française (…) puis nous avons envoyé notre localisation à la police française et ils nous ont dit : “Vous êtes dans les eaux anglaises, appelez les Anglais”. Nous avons appelé deux fois les Britanniques. Ils nous ont dit d’appeler les Français ».

Ils ajoutent qu’à la suite de ces appels, personne n’est venu les sauver. Ce n’est qu’à 14h30 qu’un pêcheur découvre une quinzaine de corps flottant au large de Calais. Ce dernier est choqué et décrit cette scène comme un « film d’horreur ». Quelques heures plus tard, un navire de secours récupère les corps flottants. Ainsi, il a pu être recensé 27 personnes décédées, 2 personnes sauvées et 1 personne portée disparue. La plupart des personnes venaient d’Ethiopie, de Somalie, d’Afghanistan, d’Egypte ou encore d’Irak.

Cependant, la marine britannique et françaises réfutent les faits énoncés par les deux personnes sauvées, d’origine somalienne et irakienne. Dans un premier temps, la marine britannique énonce qu’ils auraient « reçus 999 appels d’urgence en provenance de la Manche, et nous avons répondu à tous ». Dans un second temps, Éric Lavault, capitaine de vaisseau français, explique « c’est évident que d’un côté comme de l’autre de la manche, la coordination est totale. Il n’y a pas de jeu de renvoi de balles ».

Le 13 février 2023, une demande a été déposée auprès de plusieurs autorités, dont la première ministre, le ministre de l’Intérieur, le secrétaire d’État chargé de la mer, le préfet maritime de la Manche et de la mer du Nord, et le directeur du Centre Régional Opérationnel de Surveillance et de Sauvetage (CROSS), formulée par trois familles de victimes et deux associations, Utopia 56 et la Ligue Des Droits de l’Homme, visant à obtenir l’indemnisation des préjudices subis suite à ce naufrage tragique.

Cette demande dénonce également l’insuffisance des moyens humains et matériels affectés au sauvetage des personnes qui traversent la Manche. La finalité de cette procédure est de mettre en lumière les responsabilités et les carences fautives des administrations impliquées dans ce drame. Les demandeurs cherchent à obtenir l’indemnisation des préjudices moraux et matériels qu’ils ont subis. Ils espèrent que cette procédure permettra de prévenir de tels drames à l’avenir, en obligeant l’État à respecter ses obligations en matière de sauvetage en mer.